martes, 11 de agosto de 2015

“Les fleurs du mal”,La servante au grand coeur dont vous étiez jalouse..., de Charles Baudelaire

LXIX.

La servante au grand coeur dont vous étiez jalouse,
Et qui dort son sommeil sous une humble pelouse,
Nous devrions pourtant lui porter quelques fleurs.
Les morts, les pauvres morts, ont de grandes douleurs,
Et quand octobre souffle, émondeur des vieux arbres,
Son vent mélancolique à l'entour de leurs marbres,
Certe, ils doivent trouver les vivants bien ingrats,
A dormir, comme ils font, chaudement dans leurs draps,
Tandis que, dévorées de noires songeries,
San compagnon de lit, sans bonnes causeries,
Vieux squelettes gelés travaillés par le ver,
Ils sentent s'égouter les neiges de l'hiver
Et le siècle couler, sans qu'amis ni famille
Remplacent les lambeaux qui pendent à leur grille.

Lorsque la bûche siffle et chante, si le soir,
Calme, dans le fauteuil je la voyais s'asseoir,
Si, par une nuit bleue et froide de décembre,
Je la trouvais tapie en un coin de ma chambre,
Grave, et venant du fond de son lit éternel
Couver l'enfant grandi de son oeil maternel,
Que pourrais-je répondre à cette âme pieuse,
Voyant tomber des pleurs de sa paupière creuse?

Charles Baudelaire, Les fleurs du mal, 1837.


LXIX.

A la buena sirvienta de quien sentíais celos,
Y que duerme su sueño bajo la humilde hierba,
Pese a todo, debiéramos llevarle algunas flores.
Los muertos, pobres muertos, sienten grandes pesares,
Y cuando lanza octubre, tundidor de los árboles,
Su viento melancólico en torno de sus mármoles,
A los vivos, sin duda, encuentran muy ingratos,
por dormir, como hacen, al calor de las mantas,
Mientras que, devorados por negros pensamientos,
Sin vecino de lecho, sin agradables charlas,
Esqueletos helados que comen los gusanos,
Notan como gotea la nieve en el invierno
Y como fluye el tiempo, sin familia ni amigos
Que reemplacen los trozos que cuelgan de sus rejas.

Cuando silva y crepita el leño, si una noche,
tranquila, en el sillón la viera acomodarse,
Si, en una noche azul y fría de diciembre,
La hallara agazapada en un rincón del cuarto,
Seria, y recién llegada desde su eterno lecho
Para mimar al niño con maternal mirada,
¿Que le respondería, a esa alma piadosa,
Viendo caer las lágrimas de sus vacías órbitas?

Charles Baudelaire
(Versión de Pedro Casas Serra)

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