CXI. SEMPER EADEM
“D'où vous vient,
disiez-vous, cette tristesse étrange,
Montant comme la mer
sur le roc noir et nu?”
-Quand notre coeur a
fait une fois sa vendange,
Vivre est un mal. C'est
un secret de tous connu,
Une douleur très-simple
et non mystérieuse,
Et, comme votre joie,
éclatante pour tous.
Cessez donc de
chercher, ô belle curieuse!
Et, bien que votre voix
soit douce, taisez-vous!
Taisez-vous, ignorante!
âme toujours ravie!
Bouche au rire
enfantin! Plus encor que la Vie,
La Mort nous tient
souvent par des liens subtils.
Laissez, laissez mon
coeur s'enivrer d'un mensonge,
Plonger dans vos beaux
yeux comme dans un beau songe,
Et sommeiller longtemps
à l'ombre de vos cils!
Charles Baudelaire, Les fleurs du mal, 1837.
CXI. SEMPER EADEM
Decís: “¿De dónde
os viene esta extraña tristeza,
que cual oleaje rompe
sobre las negras rocas?”
-Cuando ya el corazón
ha hecho su vendimia,
Vivir es doloroso. Es
secreto sabido,
Un dolor muy sencillo y
nada misterioso,
Y, como vuestra dicha,
para todos radiante.
Dejad de preguntar, ¡oh
bella entrometida!
Y, ¡callad!, aunque
sea tan dulce vuestra voz.
¡Callaos, ignorante!
¡Alma siempre encantada!
¡Boca de infantil
risa! La Muerte nos sujeta,
Más aún que la vida,
con vínculos sutiles.
¡Dejad mi corazón
embriagar de mentira,
Hundirse en vuestros
ojos como en un bello sueño,
Y dormir para siempre
bajo vuestras pestañas!
Charles Baudelaire
(Versión de Pedro Casas Serra)
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